J’admire énormément le Pr Jordan B. Peterson, car non seulement c’est un génie, mais il est très pieux, réellement bon et courageux – il est, à sa façon pacifique, un guerrier qui n’accepte aucune compromission … un héros du XXIème siècle !
Alors, j’ai traduit une de ses vidéos (Jordan Peterson *NEW* The Meaning of Life : https://www.youtube.com/watch?v=6Irxo67AVeQ), pour que les non-anglophones puissent profiter de sa sagesse.
L’hiver nous pousse à l’introspection, à se poser des questions sur le sens de la vie, car elle est courte, & il importe de la vivre bien, avant d’atteindre l’échéance (fatale) …
Il commence en disant qu’il est frappé par le fait que généralement, ce ne sont pas tant nos réponses qui sont fausses, que nos questions – ou plus précisément, le fait qu’elles sont mal posées ; qu’on les pose à l’envers.
Par ex, on remarque que les troubles anxieux sont très courants, et l’on se demande pourquoi tant de gens le sont.
Mais c’est une bête question, car les raisons pour lesquelles les gens sont anxieux sautent aux yeux.
La question devrait être : pourquoi les gens ne sont-ils pas tellement terrifiés qu’ils ne puissent plus bouger ?
Car ce qui est mystérieux, ce ne sont pas les nombreux accès d’anxiété, mais bien les brefs accès de calme !
Autre bête question : pourquoi est-ce qu’on remet nos tâches à plus tard ? La réponse est évidente ; il est clair que la procrastination est la « position par défaut » !
Le mystère, c’est pourquoi on se lève et qu’on fait parfois des choses difficiles.
Idem avec : Pourquoi les gens se droguent-ils ? La question devrait être : pourquoi les gens ne prennent-ils pas constamment de la drogue, jusqu’à en mourir ?
Et il en va de même avec la question du sens de la vie ; « Y a-t-il un sens à la vie ? » est une bête question.
On ne se la pose pas lorsqu’on est dans une situation douloureuse ; car là, on sait qu’elle a un sens, qui est la douleur.
La question devrait être : devant la douleur & la souffrance, la vie a-t-elle un sens positif ?
Si l’on prend l’exemple d’une belle symphonie de Beethoven, certains disent qu’elle n’a pas de sens parce qu’elle est destinée à finir. Et idem avec le monde : pourquoi se soucier des problèmes, alors qu’il finira dans 10 millions d’années ?
Mais alors, c’est qu’on pense trop & qu’on ne prête pas attention à ce qui se passe.
Est-ce ce genre de réponse qu’on donnera à un enfant qui souffre ou qui a peur ; que ce n’est pas grave, car cela aura perdu toute importance dans 10 millions d’années ? On voit bien que cette réponse-là est absurde.
Le simple fait que l’on puisse évoquer des périodes de temps où notre activité actuelle soit vidée de toute signification, ne fait que prouver qu’on peut jouer avec des significations à travers le temps – ça ne nous dit rien du sens de la vie.
Une chose qui a du sens doit-elle obligatoirement en avoir un même dans un avenir très très éloigné ?
Cessons de conceptualiser notre vie en la considérant à travers des périodes de temps qui en ôtent tout sens positif – car poser la question ainsi ne fait que nous déprimer.
On voit que poser la question ainsi ne « sonne pas juste ».
Certains argueront qu’il n’y a rien de mal à poser des questions, mais souvenons-nous de l’enfant en souffrance ; parfois, poser des questions d’une certaine manière est mal, et se demander quelle différence cela fera dans 10 millions d’années n’est pas la bonne réponse à donner à un enfant qui souffre.
Elargissons cette idée de souffrance ; parfois, elle provient, non d’une maladie, mais est infligée exprès (comme les nazis dans les camps, durant la Seconde Guerre Mondiale).
Le but de la malveillance consciente est juste d’empirer les choses, de la pire façon possible – c-à-d d’amplifier les souffrances d’un être le plus innocent possible, de la façon la plus dénuée de sens possible.
Si, devant ce genre d’actes, on demande quelle différence cela fera dans 10 millions d’années, cette réponse ne s’applique pas à la situation ; elle montre que le cadre dans lequel cette réponse est donnée, est non-valide.
Le « je pense, donc je suis » de Descartes, signifie que l’on ne peut douter la réalité de notre propre conscience.
Alexandre Soljénitsyne décrit, dans « l’Archipel du Goulag », la catastrophe de l’état soviétique, et comment la population emmêlée dans cette idéologie, est descendue dans la tromperie, le ressentiment et la cruauté.
Lors du procès de Nuremberg, on a entendu citer des actes si mauvais, qu’il n’y avait absolument aucune excuse à les commettre, peu importe qui l’auteur était, quelles étaient ses raisons, ou comment il avait été éduqué.
Soljénitsyne dit que ce procès a établi la réalité transcendante du Mal – ceci est lié à l’idée de la souffrance.
On a réellement besoin d’une réponse aux conséquences des souffrances dues à la malveillance – car c’est ça, le Mal ; l’exagération consciente d’une souffrance non-nécessaire.
Voilà déjà une chose fermement établie : quoi que cela soit, c’est mal ! Voilà une vérité qu’on ne peut écarter avec des objections rationnelles, émergeant d’une réflexion sur la prise de conscience des limites de la vie. Ces réponses-là ne sont pas assez sérieuses que pour traiter ce problème.
Voici donc établie une base solide, sur laquelle il n’y a pas de contestation possible ; il existe des actes qui sont indubitablement mauvais. Et ceci implique qu’il y a donc aussi des actes qui sont indéniablement bons.
Ceci ne veut pas dire que l’on sait quels ils sont… mais on peut déduire que tout ce qui nous mène le plus loin possible d’Auschwitz, est bon.
Qu’est-ce que ça peut être ? Il faut tenter de comprendre quelle est cette route qui nous éloigne de créer de la souffrance & même, de défaire la souffrance multipliée par la malveillance.
Nous souffrons tous (c’est le sens de la vie), & cette souffrance est exacerbée par la malveillance qui est en chacun de nous – et donc, le problème majeur auquel nous sommes confrontés, est la question de qu’est-ce qu’on peut y faire. Une réponse est de vivre une vie qui se manifeste comme étant significative.
Le sens n’est pas quelque chose de rationnel ; ce n’est pas quelque chose que l’on crée.
Nietzsche pensait que comme Dieu est mort, nous devons créer nos propres valeurs ; devenir, en quelque sorte, des dieux, mais on ne peut créer nos valeurs ; nous devons les découvrir ; découvrir quelles sont ces valeurs éternelles, qui si elles sont trouvables, sont précisément celles qui nous éloignent de la voie de la perdition (incarnée par des lieux comme Auschwitz).
Nous savons tous ceci ! Bien sûr, on peut le remettre en question. Mais remettre ceci en question juste parce qu’on proteste contre toute grandeur, sous prétexte que ça finira un jour, revient à « taper à côté », à perdre de vue le principal.
Ce sens instinctif qu’on éprouve lorsque l’on écoute une belle symphonie est réel, cette expérience sentie du sens qui nous submerge, n’est pas qu’un épiphénomène (la simple réflexion d’un processus plus fondamental), mais bien ce qui est plus fondamental que quoi que ce soit d’autre !
On ne peut pas nier que la douleur ou la souffrance soit réelle, ou que la souffrance causée par la malveillance soit la pire souffrance qui existe. Ce sont là des sens de la vie qui sont indéniables.
Et si vous croisez la malveillance sur votre route, la probabilité que vous vous en sortiez sain & sauf est très basse ; cela vous abîmera psycho-physiologiquement, & vous pouvez ne jamais recouvrer votre intégrité. Voilà qui est réel.
Alors, la voie inverse, ou celle qui transcende cela, est-elle réelle également ? J’en suis venu à croire (dit le Pr Peterson) que cette voie-là est encore plus réelle, malgré mon pessimisme sur la nature de l’humanité (moi-même inclus).
Aussi réels que je croie que sont le mal & la souffrance, il m’apparaît que le mobile qui nous en éloigne, celui qui nous permet de supporter la souffrance avec noblesse & d’être utile à d’autres qui sont dans la douleur, de maîtriser la malveillance dans notre propre cœur & autour de nous, ce mobile-là est plus puissant que ce pour quoi il existe (ce à quoi il s’oppose).
On vit ceci, mais on ne s’en rend pas compte – sans doute parce qu’on est trop occupés à penser – car remarquer quelque chose & penser sont 2 choses différentes.
Nous voyons dans notre vie, quand nous sommes engagés dans quelque chose de profondément significatif.
Le meilleur chemin vers ceci est la musique ; c’est la voie la plus rapide & incontestable. Tout le monde aime la musique, laquelle nous parle de sens, nous montre comment serait la vie si elle était ordonnée & harmonieuse, et si on dansait dessus comme il le faut ; elle nous intime d’être psychologiquement intègre.
Si vous observez votre vie jour après jour, vous remarquerez qu’il y a des moments où vous êtes engagé si profondément dans ce que vous faites, que ce que vous faites contient tellement de sens (un sens qui s’annonce de lui-même, non un sens que vous créez), que vous vous dites que cela vaut bien la souffrance inévitable de la vie.
Voilà ce qu’est le sens de la vie : c’est ce qui rend la souffrance valable (= qu’il vaille la peine de vivre, malgré elle). Ce sens-là n’est pas une chose que l’on crée ; c’est quelque chose qu’on découvre.
En observant notre vie ainsi, jour après jour, heure par heure, minute après minute, on remarque quand on se conduit (ou qu’on est conduit) de manière à permettre à ce sens de se révéler, eh bien, à ce moment, même si on ne le remarque pas, les conditions de notre vie se justifient.
Ceci est très important car la douleur, la souffrance & la malveillance existent réellement, & le fait qu’il y ait quelque chose qui les justifie, montre un sens.
On trouve ce sens le plus aisément dans l’Art, la littérature, dans les relations avec d’autres (à conditions que ces relations soient basées sur la vérité & la confiance), dans ce que l’on fait et dit (à condition que ce que l’on fait & dit vienne du cœur).
On peut vraiment vivre ceci, mais le prix de pouvoir vivre ceci, est qu’il faut assumer la responsabilité d’être – c-à-d prendre volontairement la responsabilité de la souffrance résultant de la vie, l’accepter et travailler à l’améliorer. Pour beaucoup, ceci est une barrière.
Alors, les arguments du genre de ; « de toute façon, qu’est-ce que ça fera comme différence dans 10 millions d’années ? », ne sont pas des objections hyper-rationnelles à la nature de la vie, mais des excuses hyper-rationalistes d’avoir échoué à porter la responsabilité de vivre comme il faut, moment après moment & heure après heure.
Si vous avez, par ex, un enfant malade, ou qui a été blessé, vous lui direz : « je suis avec toi, je suis à tes côtés, ce qui peut t’arriver importe, et on va faire tout ce qui est possible pour s’en sortir ensemble. »
Ceux qui pensent que ceci n’a aucun sens, c’est qu’il y a quelque chose qui cloche avec leur âme ! Si dans ce genre de cas, ils rétorquent : « bah, quelle différence est-ce que ça fera dans 10 millions d’années ? », c’est le diable en personne qui parle !
Bref, le Pr Peterson nous montre que le courage est la clé ; comme l’a si bien dit Amelia Earheart, « Le courage est le prix que la vie exige de nous en échange de la paix ».
Les nihilistes sont des trouillards qui cachent leur lâcheté sous une fausse assurance cynique – & ils servent le Mal.
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